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ChroniqueLes ridicules insuccès des Maple Leafs de Toronto

Un joueur de hockey sort de la glace, deux autres de la même équipe attendent sur la glace et semblent déçus.

John Tavares, Tyler Bertuzzi et Morgan Rielly

Photo : AP / Michael Dwyer

Il y a, semble-t-il, trois certitudes dans la vie : la mort, les impôts et les éliminations rapides des Maple Leafs de Toronto.

Une fois de plus, les partisans des Maple Leafs ont vu leur équipe plier bagage au premier tour, samedi soir, face aux Bruins de Boston. David Pastrnak a brisé une égalité de 1-1 après seulement 114 secondes de prolongation pour permettre à son équipe de remporter le septième match de cette étrange série. Les Bruins croiseront ainsi le fer avec les Panthers de la Floride au tour suivant.

Les Maple Leafs semblent prisonniers d’un vortex perdant dont ils ne parviendront jamais à s’extirper.

Ils n’ont remporté qu’un tour éliminatoire depuis 2017. C'était la saison dernière. Pourtant, les Leafs ont formé la troisième équipe de la LNH en saison durant cette longue période. Et ces succès sont en grande partie dus au fait qu’ils alignent 4 des 28 meilleurs attaquants de la ligue.

Incroyablement, il s’agissait samedi de la sixième fois de suite que les Torontois s’inclinaient dans le septième match d’une série. Et quatre de ces défaites l'ont été contre les Bostoniens.

Avant 2017, les Maple Leafs avaient raté les séries 10 fois en 11 ans. Et ils avaient été évincés au premier tour en 2013 (dans un septième match face aux Bruins) à leur seule participation aux séries durant cette traversée du désert. Toronto n’a donc remporté qu’un tour éliminatoire au cours des 20 dernières années.

***

Pour toutes ces raisons, ce qui se produira à Toronto au cours des prochaines semaines pourrait devenir une fort intéressante étude de cas dans le cadre d’un cours de gestion.

Le contexte est par ailleurs très particulier si l’on tient compte du fait que les Maple Leafs connaissent la meilleure période de succès de leur longue histoire en saison. Il faut donc s’assurer de poser les bons diagnostics et de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain.

Depuis samedi soir, une importante frange de partisans des Leafs réclame des têtes. Beaucoup de têtes. Certains souhaitent que les principaux responsables de l’équipe de direction, le président Brendan Shanahan, le directeur général Brad Treliving et l’entraîneur Sheldon Keefe, soient virés pour faire place à du sang neuf.

Depuis la récente nomination de Keith Pelley à la présidence de Maple Leaf Sports and Entertainment (MLSE), plusieurs observateurs croient qu’un tel ménage est possible.

Le hic, c’est que décapiter une organisation au grand complet et se lancer à la recherche de candidats qualifiés à moins de deux mois du repêchage n’est probablement pas une bonne idée. D’autant plus que Treliving est assis dans le fauteuil du DG depuis moins d’un an.

Un entraîneur de hockey parle à l'oreille d'un de ses joueurs assis au banc. Un coéquipier les regarde.

John Tavares, Sheldon Keefe et Auston Matthews

Photo : The Canadian Press / Frank Gunn

D’autres réclament que le noyau des quatre piliers offensifs de l’équipe (Auston Matthews, Mitch Marner, William Nylander et John Tavares) soit démantelé pour doter la formation d’une plus grande profondeur.

Ces quatre attaquants monopolisent 48,5 % de la masse salariale de l’équipe. Aucune autre organisation de la ligue ne consacre autant d’argent à ses quatre meilleurs attaquants. En même temps, Matthews, Marner, Nylander et Tavares répondent aux attentes. Ils ont inscrit près de 47 % des buts des Leafs depuis 2017.

Un éventuel démantèlement du quatuor s’avère problématique dans la mesure où Tavares est âgé de 33 ans et qu’il ne lui reste qu’une année de contrat à écouler. À l’été 2025, si les Leafs souhaitent garder leur capitaine, il leur sera sans doute possible de le faire en convenant d’une entente à court terme et moins onéreuse que les 11 millions qu’il commande actuellement. Et s’ils ne désirent pas le garder, ils disposeront d'une somme de 11 millions de marge de manœuvre pour peaufiner leur formation.

Et puisque Tavares arrive à l’automne de sa carrière, il ne serait pas très logique d’échanger l’un des trois autres. Matthews, Marner et Nylander sont respectivement âgés de 26, 27 et 28 ans. Ils sont à leur apogée. Qui plus est, tous ces joueurs détiennent des clauses de non-mouvement. Le fait qu’ils aient le luxe de choisir leur prochaine destination atténue l’énorme valeur qu’ils auraient si l’on pouvait les offrir à n’importe laquelle des 31 autres équipes de la ligue.

Bref, pour changer l’invraisemblable trajectoire de leur équipe, les dirigeants de MLSE devront probablement adopter une approche plus mesurée et plus classique.

***

On s’entend, il n’est pas normal qu’une équipe collectionnant les saisons de 100 points avec autant de facilité soit incapable de perpétuer ces succès quand les séries commencent. Cela dit, personne ne s’attendait à ce que les Maple Leafs fassent long feu cette année.

Dans une chronique précédente, je m’étais amusé à faire de la rétro-ingénierie en décortiquant les traits dominants des équipes ayant remporté la Coupe Stanley au cours des 10 dernières années.

Cet exercice avait permis d’établir qu’une forte majorité des équipes championnes :

  • avait amassé au moins 100 points en saison;
  • misait sur un gardien fiable (moyenne d’efficacité de ,915 ou plus);
  • figurait dans le top 10 défensif de la LNH (buts accordés);
  • figurait parmi le top 10 de la LNH à cinq contre cinq (buts accordés);
  • figurait dans le top 10 de la LNH à cinq contre cinq (indice CORSI);
  • avait disputé au moins quatre tours éliminatoires lors des deux printemps précédents;

Or, les Maple Leafs ne répondaient qu’à l’un de ces six critères, malgré leurs 102 points de classement. Leurs adversaires, les Bruins, répondaient à quatre de ces six critères. Et malgré cela, les Bruins ne seront probablement pas de taille contre les Panthers de la Floride, qui cochent les six cases et qui, de surcroît, leur sont supérieurs en attaque.

***

Les Maple Leafs semblent pris dans le même genre de cul-de-sac dans lequel les Capitals de Washington s’étaient enlisés à compter de la fin des années 2000. Les Caps offraient de solides saisons offensives, mais leurs lacunes en défense les empêchaient de connaître de longs parcours printaniers.

Il a fallu l’arrivée de Barry Trotz, en 2014-2015, pour transformer durablement les Capitals en solide équipe défensive. Et ce n’est qu’à la quatrième année de Trotz, en 2018, qu’ils ont fini par atteindre la finale et à remporter la Coupe Stanley.

Les Oilers d’Edmonton formaient aussi une équipe unidimensionnelle au cours des dernières saisons. Leur attaque était la deuxième de la LNH et leur unité d’avantage numérique était une véritable terreur. Mais ils commettaient tellement d’erreurs en défense et manquaient tellement de constance qu’ils finissaient invariablement par se tirer dans le pied durant les séries.

Cette saison, les Oilers ont changé leur façon de jouer. Ils excellent en défense et répondent à cinq des six critères énumérés plus haut. Le fait saillant de leur série de premier tour face aux Kings de Los Angeles a d’ailleurs été une victoire de 1-0 qu’ils sont parvenus à décrocher malgré le fait qu’ils n’aient obtenu que quatre chances de marquer.

***

Les exemples de Washington et d’Edmonton montrent qu’il est possible pour une excellente équipe offensive d’évoluer et de rehausser son jeu défensif de manière à ce que cet aspect du jeu finisse par s’imprégner dans son ADN.

Il est d’ailleurs inconcevable que cette hargne en défense ne fasse pas déjà partie de la personnalité collective des Maple Leafs quand on sait que leur plus grande vedette offensive, Auston Matthews, est l’attaquant qui a bloqué le plus grand nombre de tirs dans la LNH depuis deux ans. Ce n’est donc pas la volonté qui manque!

Les Leafs eux-mêmes ont prouvé contre les Bruins qu’il leur est possible de mieux jouer en défense. Ils ont toutefois commencé à le faire quand ils tiraient de l’arrière 1-3 dans la série et qu’ils n’avaient plus le choix. Ils ont aussi attendu d’être acculés au pied du mur avant de commencer à faire preuve de discipline et à éviter le banc des pénalités.

Les Leafs n’étaient donc pas prêts quand la série a commencé.

Les exemples de Washington et d'Edmonton nous enseignent aussi qu’il a fallu procéder à un changement d’entraîneur pour finir par obtenir des changements draconiens dans leur façon de jouer.

Sheldon Keefe a beaucoup cogné sur le clou de la défense et les Leafs ont connu deux excellentes saisons sur ce plan sous sa gouverne. Il n’a toutefois pas été capable de perpétuer ces intéressants soubresauts. Et son équipe n’a jamais semblé à l’aise dans le style de jeu hermétique qui prévaut dans les séries.

Keith Pelley se mettra-t-il à couper des têtes pour plaire aux partisans en colère, ou les Leafs feront-ils preuve de retenue? Ce sera intéressant à voir.

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